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Non à la fermeture des Centres d'Information et d'Orientation (CIO) dans l'Académie de Rouen

Le Rectorat de Rouen décide de fermer de nombreux CIO dans l'Académie en 2014-2015. Quelles conséquences pour les usagers, élèves, parents, étudiants, adultes ?...

Le point sur la situation - 21/06/15

Publié le 21 Juin 2015 par cio académie rouen in Le point sur la situation, Informations

Le point sur la situation - 21/06/15

Notre Collectif est sur le point de réunir toutes les pièces du puzzle concernant la menace globale qui plane sur les Centres d'information et d'orientation (CIO) de notre Académie, et de toute la France.

Nos cinq axes de réflexion sont les suivants.

1) La carte "réorganisée"

La nouvelle carte des CIO établie par le Rectorat est d'une pauvreté absolue, de laquelle a disparu 7 CIO sur les 17 pré-existants en 2013 : Montivilliers, Barentin, Bernay (fermés en 2014), Le Havre-nord, Eu, Vernon (qui vont fermer en 2015), Rouen-centre (le regroupement avec Rouen-sud ne trompe personne : pour le grand public, il s'agit bien d'une fusion des deux structures).

3 "sites" seront aménagés sur Eu, Vernon et Mont-Saint-Aignan, sans aucun loyer à payer. Ces "machins" n'auront aucune existence juridique, aucune obligation de service quelconque, et pourront être fermés du jour au lendemain. Ils ne peuvent être décomptés dans la carte des CIO.

Les 10 CIO restants vont du reste coûter très peu d'argent au Rectorat : les centres de Dieppe, Fécamp et Lillebonne sont hébergés à titre gracieux par les municipalités, celui d'Elbeuf va déménager dans des locaux municipaux où le loyer sera réduit, celui du Havre-sud occupe deux étages dont le Rectorat est propriétaire, celui de Rouen-sud est hébergé dans les locaux de la Direction des services départementaux de l'Education nationale, initialement non destinés à recevoir du public, et à coût zéro (en même temps, payer un loyer pour un espace aussi délabré relèverait du scandale).

Le Ministère a défini que la carte des CIO de l'Académie de Rouen contiendrait 11 CIO d'Etat, c'est à dire 11 centres entretenus par l'Etat. La somme forfaitaire définie par la rue de Grenelle est de 35.000 euros par centre et par an. Le Rectorat devrait donc percevoir de l'Etat 11 x 35.000 = 385.000 euros pour l'entretien des CIO de l'Académie, annuellement.

Il apparaît qu'avec toutes les mesures de réorganisation prises, les CIO de l'Académie ne coûteront pas ce prix, mais moins. Où va passer l'argent initialement destiné à nos services ?

Le point sur la situation - 21/06/15

2) Le manque de cohérence dans les directives administratives

Le Rectorat se défend en prétendant qu'il respecte scrupuleusement la commande ministérielle : 11 immatriculations, c'est à dire 11 existences juridiques officielles de CIO.

Ce n'est pas le discours que nous avons entendu ou lu, de la bouche ou de la plume même de la Ministre, qui a plusieurs fois répété à l'oral comme à l'écrit que les CIO qui pouvaient être maintenus devraient l'être.

Selon notre Collectif, avec l'argent versé par le Ministère pour 11 CIO, et le financement actuel de 5 municipalités (Fécamp, Lillebonne, Dieppe, Eu et Vernon), nous pourrions donc avoir 11+5= 16 CIO, pas 10.

Cette divergence entre le Rectorat et nous ne peut être lié à une différence d'interprétation, le discours de la Ministre étant trop clair pour cela. Notre Collectif penche donc pour une autre explication : les consignes administratives adressées au Rectorat par le Ministère ne sont pas les mêmes que les idées développées par la Ministre dans ses discours.

Il est donc probable que les économies faites sur le dos des CIO soient dans une certaine mesure encouragées par certains services de la Rue de Grenelle, au mépris de la politique générale de la Ministre et de son cabinet.

La désobéissance de l'administration à la Ministre, par idéologie anti-CIO et par mesure d'économies court-termistes minables, a pour conséquences des disparitions de services publics à destination des usagers les plus faibles économiquement et socialement (Bernay, Le Havre, etc.). Une conséquence aux antipodes de la volonté affichée par la Ministre et tout le gouvernement d'aider les plus faibles.

Cependant, ces usagers existent réellement, sont des êtres pensants et pour une certaine part d'entre eux, des citoyens exerçant leur droit de vote. L'abandon affiché par l'Etat, via la destruction des services publics, se traduira nécessairement par une dégradation dans l'opinion publique, une sanction dans les urnes et un agacement mis sur la place publique via les commentaires déplaisants sur les réseaux sociaux, dont est si friande notre Ministre.

Ou quand l'administration se débrouille toute seule pour bousiller l'image des pouvoirs publics ; nous n'y sommes pour rien !

Le point sur la situation - 21/06/15

3) La mise en place du SPRO

Les Régions sont mandatées pour coordonner le Service public régional d'orientation (SPRO), à destination des publics non scolarisés. La loi du 5 mars 2014 rappelle que c'est encore l'Etat qui a la mainmise sur l'orientation des publics scolarisés, via l'Education nationale.

Les CIO ne font donc pas partie du SPRO, mais pourraient en devenir partenaires, dans un monde parfait où ils ne feraient pas l'objet d'une grande manoeuvre de destruction.

Car tout le problème est là : en les affaiblissant à l'extrême, on crée les conditions de leur absorption par le SPRO, voire de leur dissolution dedans. Si l'on ajoute à cela les tentatives réitérées -et avortées, faute d'intérêt de la chose- de régionaliser les services dans le passé (2003, 2012), l'on voit bien que la tentation demeure grande de considérer que les CIO, et donc leurs personnels, n'auraient rien à faire dans l'Education nationale.

Nous rappelons qu'au vu de la peau de chagrin à laquelle est réduit le budget des CIO sur notre Académie, il nous semble évident que le Rectorat souhaite se débarrasser de la gestion de nos services.

Sauf que considérer que les CIO, supports administratifs et de travail des équipes, n'ont rien à faire dans l'Education nationale, c'est considérer que les COP n'ont rien à y faire non plus. C'est donc considérer que les conseillers d'orientation-psychologues n'ont plus à s'occuper des publics scolarisés (même si la loi rappelle le contraire).

Si on pousse cette logique académique et régionale plus loin, disons le donc clairement : il faudrait que les COP ne s'occupent plus des élèves. Fini donc l'accueil des enfants arrivant de l'étranger, fini l'aide aux élèves en difficulté scolaire, ou handicapés, ou décrocheurs. Finie l'aide aux lycéens et aux étudiants quant à leurs choix d'études et à la saisie post-bac. Etc., etc.

C'est absurde, non ? Pourtant, les derniers développements montrent un glissement dangereux vers cela ! Le Rectorat n'interdit pas aux CIO qui le souhaitent de participer au SPRO, comme si nos centres étaient des structures autonomes ! Quant au cahier des charges donné par la Région, il éloigne les CIO de leurs pratiques d'accompagnement du public...

Il faut rappeler que dans certaines régions déjà (Bretagne, Rhônes-Alpes...), les CIO font partie intégrante du SPRO, ce qui met les collègues en difficulté vis à vis des publics scolaires (moins de présence, traitement des élèves comme s'ils étaient des adultes...).

Dans un monde idéal, où le réseau des CIO serait fort, légitimé par son administration de tutelle et jamais inquiété financièrement, le partenariat ne poserait aucun problème avec la Région. Mais ce n'est pas le cas, et nous avons comme un doute sur les intentions des uns et des autres.

Le point sur la situation - 21/06/15

4) La fusion des Régions

La réforme territoriale prévoit que les deux régions normandes fusionnent le 1er janvier 2016. Dans ce cadre, un réaménagement des deux académies (Caen et Rouen) est à prévoir. Le recteur de Caen a déjà été désigné "super-recteur", c'est à dire qu'il coordonne la réflexion et les actions autour de la fusion prévisible des Rectorats.

En devenant une super-Académie, des questions inquiétantes demeurent en suspens quant à la future carte des CIO. Il est à craindre que des fermetures aient encore lieu, avec le changement d'échelle géographique.

Car quand on regarde une carte de la Haute-Normandie, les CIO de Louviers et d'Elbeuf, par exemple, sont à distance. En revanche, quand on regarde une carte de la Normandie réunifiée, les deux "points" se touchent presque.

Nos administratifs, technocrates qui ne sortent jamais de leur bureau, pourraient se laisser séduire par de nouvelles facilités à fermer des structures apparemment voisines, alors qu'en réalité, elles font l'objet d'un éloignement à la fois géographique, social, de transport et administratif (pas les mêmes départements pour Louviers et Elbeuf, par exemple).

5) La montée en puissance du privé

Les publicités des organismes privés commencent à fuser, proposant des bilans dont la moyenne s'établit à 500 euros, pour des prestations parfois douteuses, voire franchement malhonnêtes (nous en parlons régulièrement sur ce blog).

L'abandon des CIO par l'Etat et certains rectorats, leur insolubilité dans le SPRO et l'inadéquation de ce dernier concernant l'accompagnement des publics scolaires, créent les conditions idéales pour qu'un marché privé en matière d'orientation scolaire explose.

L'inégalité d'accès financier à ces prestations, et leur manque régulier de fondement, voire de qualité, interroge sur ce que nous voulons pour les enfants de ce pays.

Où se trouve, dans tout cela, le fameux "Donner plus à ceux qui en ont besoin" ? Où est l'équité ? Où est la justice sociale ? Où est l'ascenseur social ?

Le point sur la situation - 21/06/15

Conclusion

La montée en puissance des futures "super-régions" se traduit par une grande réorganisation/désorganisation des services publics, y compris ceux qui ne relèvent pas de leur compétence.

Il existe une tentation de l'administration ministérielle, au-delà des politiques affichées dont elle se préoccupe finalement très peu, d'en profiter pour légitimer un désinvestissement des services dont elle ne veut plus s'occuper.

En ce qui concerne les CIO, certains recteurs, comme à Toulouse, font le choix de ne pas se laisser entraîner sur cette pente dangereuse, et réclament davantage de moyens pour maintenir les CIO, en établissant une carte où les fermetures sont extrêmement limitées, preuve que c'est possible.

Ce n'est pas le choix de notre Recteur, sur Rouen, qui semble davantage préoccupée par une séduction envers l'administration ministérielle, économisant à tour de bras sur les CIO, au mépris des discours de la Ministre, ce qui constitue un désaveu flagrant de sa supérieure hiérarchique.

Comme d'habitude, dans ces luttes d'influence et de pouvoir, les petites gens sont complètement absentes des considérations de la haute administration. Les fermetures de CIO, et de services publics, ont des conséquences ravageuses sur les usagers, sur les catégories socio-professionnelles défavorisées en particulier.

La solution serait pourtant simple, pour l'administration rectorale. Il suffirait d'utiliser l'argent officiellement attribué par le Ministère, et les moyens proposés par certaines municipalités, pour établir une carte de 16 CIO, incluant la réouverture promise, et jamais mise en oeuvre, du centre de Bernay.

Ce réseau de 16 CIO, implanté solidement, avec un maillage territorial efficace et correspondant aux besoins des usagers, pourrait alors envisager un partenariat global avec le SPRO, à destination de publics communs comme les jeunes qui décrochent du système scolaire. Ce partenariat existe déjà entre certaines structures relevant du SPRO, les Missions locales, et les CIO. Avec un beau réseau solide des CIO, ce partenariat augmenterait son efficacité en faveur des jeunes.

Nous sommes prêts à discuter de ces options lors d'un groupe de travail régulier que le Rectorat pourrait nous proposer. Mais hélas, vous l'avez bien compris, de groupe de travail, il n'existe point. Preuve que l'administration souhaite prendre des décisions qui sont indéfendables du point de vue des professionnels de terrain et des usagers.

Sauvons nos CIO !!!

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U
Là où j'habite j'ai eu l'occasion de me rendre compte que la conseillère du CIO n'écoute pas les élèves qui viennent la consulter d'où l'utilisation légitimes des services privés même par les membres de l'éducation nationale.
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C
Là où j'habite, j'ai eu l'occasion de me rendre compte que le bus arrive en retard souvent, d'où l'utilisation légitime de taxis super-chers. Là où j'habite, des rétroviseurs sont parfois cassés dans la rue, d'où le recours légitime à des milices privées au lieu de la police nationale. Là où j'habite, j'ai eu l'occasion de me rendre compte que le président et son gouvernement n'écoute pas les électeurs qui ont voté pour lui et sa majorité, d'où le recours légitime à un pouvoir public donné aux entreprises privées. Bravo, quel bel argumentaire. Notre société va aller très loin avec ça !
M
Mission locale pôle emploi cio même reseau
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C
Non, les CIO ne font pas partie du même réseau que les ML et le Pôle-Emploi. ce qui ne signifie pas pour autant qu'ils sont opposés au partenariat avec ces structures ! Cependant, comment créer un partenariat efficace, si les CIO meurent ?