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"Les limites de la tyrannie sont celles que tolère la patience de ceux qu'elle opprime." - Frederick Douglass
Ambiance...
15h
Début de l'assemblée générale au local du SNES. Tour de table, les interventions portent à la fois sur le niveau académique (projet de "réorganisation" de la carte des CIO) et sur le niveau national (groupe de travail ministériel sur les statuts et missions des CIO et de leurs personnels).
Pour un grand nombre de personnes s'exprimant, les choses sont claires : les informations contradictoires et floues qui nous arrivent de toute part ne sont pas sans montrer un évident mépris pour les usagers et les personnels.
Le constat est sans appel : le projet académique est toujours en place. Il va falloir agir dans les prochaines semaines, et pourquoi pas pendant les vacances scolaires. Cette proposition émane de lycéens de l'UNL, qui nous ont fait l'amitié de leur présence.
En cours d'AG, quelques directeurs, qui étaient en réunion, passent discuter avec nous, et faire état de leurs tractations avec des élus locaux. Mais ils doivent repartir presque aussitôt, car il est bientôt l'heure pour eux de se rendre à une autre réunion, celle fixée par le cabinet de Mme le Recteur.
17h
Un cortège d'une quarantaine de personnes, personnels de CIO, mais aussi enseignants, lycéens ou usagers, se rend devant les grilles du Rectorat.
Casseroles, bidons, maracas, cornes de brume, sifflets, et évidemment sono-micro produisent un boucan d'enfer. Le but : interférer avec la réunion qui se tient à ce moment.
Pendant ce temps, Mme le Recteur en personne inaugure la réunion avec les directeurs, à laquelle assistent aussi le directeur de cabinet, le secrétaire général, le chef du SAIO, les inspecteurs information-orientation... Elle réaffirme avec conviction la pertinence de son projet ; certains directeurs expriment leur désaccord, d'entrée, déjà... Elle reparle de désinformation, niant donc la capacité des gens à simplement exercer leur esprit critique sur sa politique.
Dehors, ça discute, ça chante. La nuit tombe, mais pas la motivation. On barricade les grilles du Rectorat avec des poubelles. C'est un symbole : Mme le Recteur veut jeter nos services aux ordures, nous voulons faire de même avec sa politique de destruction. Les lycéens chantent avec nous, ils y mettent tout leur coeur.
Dedans Mme le Recteur a fini son allocution, et quitté la réunion. Le cabinet présente le "nouveau" projet : 5 CIO seulement disparaissent à l'horizon septembre 2014 : Bernay, Vernon, Montivilliers, Barentin, Eu. On a regagné une moitié ? Que nenni, les 4 autres prévus disparaîtront à l'horizon 2015 ! Le projet reste le même, seuls les délais changent. Seul Elbeuf serait sauvé, semble-t-il...
On en est informés dehors ; ça hue, ça siffle... Et le boucan repart de plus belle. On obtient l'information selon laquelle les "gens importants" sortiront par la petite entrée voitures, de l'autre côté, Rue de Fontenelle. Méfiance... Au point où on en est, ça peut être un coup fourré, une fausse information pour nous faire dégager des grilles côté boulevard... La moitié des manifestants va côté Fontenelle, l'autre moitié reste devant les grilles.
A l'intérieur, les esprits s'échauffent. Agacés, les gens du cabinet haussent le ton : ils demandent aux directeurs de descendre et d'obtenir des manifestants le retrait du blocus des grilles. Cela en dit long sur leur pensée en terme de management : intimer des ordres, mais surtout ne pas aller eux-mêmes au contact des difficultés. Navrant...
Trois directeurs descendent. La réunion ne pourra reprendre que s'ils obtiennent de nous le retrait du blocus. "On" leur a signifié qu'il était intolérable que la manifestation dégénère, que l'on insulte "les gens" et que l'on casse le portail... Désinformation... Nous n'avons insulté personne, et si le petit portail, côté Fontenelle, n'ouvre pas, c'est juste parce qu'un autocollant a été appliqué sur le détecteur de mouvements !!!
Les agents du Rectorat, et l'un des membres du cabinet, descendu expressément, enlèvent les poubelles. Certains collègues les replacent. Le ton monte. Le membre du cabinet, excédé par tant d'opposition, lâche : "C'est comme ça que vous vous occupez des enfants ?". Cela n'a rien à voir ; c'est l'argument d'un homme sur le point de craquer. Il s'entend rétorquer : "Voulez-vous que l'on discute de la façon dont vous, vous occupez des personnels ?"
Des voitures finissent par passer... Ces "pauvres personnels" dont on nous a parlés, pris en otage par les "méchants" manifestants... Alertés par une fuite, les services du Rectorat se sont occupés de faire finir les personnels avant 17h, et les gens qui sortent maintenant, à 19h, sont au volant de voitures qui coûtent très cher... Qui désinforme ? On nous avait pourtant dit que les pontes allaient sortir par la Rue de Fontenelle, fichtre... On aurait essayé de nous mentir ? Oh non, pas les services du Rectorat, quand même...
On fait passer le message aux directeurs qui remontent : tant de mépris et de mensonge de la part de l'administration, et tant que le projet de destruction des CIO restera en l'état, chaque action que nous mènerons ne pourra qu'être un peu plus déterminée et dure que la précédente. Le message est, semble-t-il, passé.
20h
La réunion touche à sa fin. On produit les derniers boucans, en entonnant "Ce n'est qu'un au-revoir". L'ambiance est redevenue bon enfant. On va débriefer, pour les quelques restants, au local SNES. Deux directeurs nous ont rejoint, la mine déconfite. Ils nous expliquent le contenu de la réunion. Désespérant. Ces gens qui nous dirigent, Recteur, directeur de cabinet, secrétaire général, CSAIO... ignorent tout de notre travail, et paradoxalement, ils le méprisent. Comment peut-on traiter avec condescendance ce que l'on ne connaît pas ?
"Mme le Recteur ne voit pas où est le problème avec la mise en résidence des conseillers en établissement : elle nous a dit que cela nous permettrait d'améliorer nos relations avec les enseignants, qui sont de très mauvaise qualité"... Quel est ce tissu d'âneries ?
Comment peut-on diriger une Académie, et connaître si peu de choses du fonctionnement de l'école ?
Comme m'a dit un collègue, et ami, professeur il y a peu : "Il serait peut-être temps que cette dame comprenne qu'ici, on est en France. Qu'ici, on est en démocratie. On n'est pas en Ukraine ; l'on discute avec les gens de ce que va être leur devenir. Et il va peut-être falloir que l'on lui fasse intégrer."
Je n'aurais pas mieux dit, mon pote. Restons déterminés. Ces gens, là-haut, ne savent rien de notre travail. Ils imposent des décisions stupides, et inattendues, au vu de leur fonction. Continuons le combat, ils ne peuvent pas gagner, leur projet est idiot et dangereux pour les usagers...
